Panique à Thiercelieux 9

- Vous insistez ? Vous me pensez vraiment responsable de tous les maux de ce village ? Hé bien vous vous trompez. Vous vous trompez lourdement. Ce village part en décrépitude, et vous n'arriverez jamais à sauver ce qu'il en reste. Mais d'ici là, je dois bien m'avouer perdu, ma personne semble être promise au bûcher, et je périrai à mon tour par les flammes.

Il fit un pas en arrière.

- Vous voulez voir mes yeux ?

Un autre pas en arrière.

- Je vais vous montrer ma réelle identité, et alors, vous comprendrez.

Son costume fut progressivement déboutonné...

- Je vous raconterais une histoire, une bien lugubre histoire qui ne cesse de tourner en rond.

...et finit par tomber au sol.

- Je vous raconterai une histoire dont on ne connaîtra jamais la fin...

Il porta sa main au masque, et le retira d'un geste lent,

- Celle que nous vivons, là, actuellement, et qui se répète depuis des générations déjà, bien avant ma naissance.

doucement,

pour enfin découvrir le visage qui se cachait derrière.

Celui du confesseur de l'église,

Celui de père Herudur.

Jadis, Herudur avait fait parti des enfants de ce village. Il aimait jouer avec ses amis, guerroyer, chasser l'ours.
En ce temps, tous les habitants pensaient s'être débarasser du démon qui avait déjà agit auparavent.
L'ancien maire, Bernardo, un sourd qui était arrivé là en accompagnant un vendeur de tapis itinérant dénommé Azraël, s'était donné la mort en se pendant. Il s'agissait du dernier lycanthrope de la région.

Du moins, c'est ce que certains croyaient, avant que la portée de la chef de meute ne réapparaisse dans la région.

Herudur était bien trop jeune pour réellement comprendre ce qui s'était passé en cette époque là. Les loups, qui s'étaient organisés en bande, avaient massacré beaucoup d'habitants. Vraiment beaucoup. Les villageois, désemparés, avaient un à un succombés à leurs crocs.

Mais un autre mal s'était installé en ce village, et avait profité de la panique pour marquer son territoire.

Ici débuta le règne de Vlad.

Les vampires se débarassèrent de tous les démons traînant dans les environs, et prirent pour esclave certains humains. Ce fut le cas du petit Herudur, dont le vampire Grenat, sous l'apparence humaine de la petite Pony, prit possession avant de quitter le village.

Pendant des lustres, Pony et Herudur vagabondèrent. La vie de vampire était amusante, et Herudur avait pris goût à la violence. Ils firent le tour de l'Europe, visitèrent mille lieux, et rencontrèrent mille et une célébrités, dont une partie fut tuée par leurs soins, et quelques autres, triées sur le volet, vampirisées bien évidemment.

Mais Herudur voulait grandir.

Quelque part, il avait cette envie en lui, celle de s'arrêter de jouer quelques instants, et surtout, de se venger de sa nouvelle condition aux habitants de son village natal.

Oui, Thiercelieux lui manquait.

Il commençait à trouver la vie éternelle moins excitante, moins surprenante.

Par un étrange concours de circonstances, il fut capturé par des gardes de l'inquisition. Plutôt que de tous les tuer, Herudur choisit de se laisser prendre, et joua la commédie.
Il la joua si bien qu'il fut jugé comme sain, et ce, par un grand inquisiteur des plus efficaces dans le dépistage des démons.

La suite fut plus étonnante encore.

Il fut placé dans un monastère, et y vécut plusieurs années.
Il ne se l'expliqua pas, mais il commença à grandir.
Cela n'avait pas de sens, pas même pour une goule.
Grandir...

Peut-être était-ce par sa nouvelle éducation spirituelle, ou peut-être parce qu'il avait été vampirisé par un très jeune vampire encore inexpérimentée à l'époque, mais les faits étaient bien là : il avait fini par redevenir humain !

Malheureusement, en contrepartie, son état de santé s'était dégradé, et il commençait à avoir une fragilité chronique face à la luminosité naturelle.

Il opta pour une vie reclue à l'église, et réussit à se faire muter à Thiercelieux, en tant que confesseur.
Cela était tout bonnement parfait pour lui.
Il pouvait rester à l'abri du soleil et éviter le regard des habitants, tout en étant au courant de tous les petits secrets de ce village.
Herudur ne tarda pas à se rendre compte qu'il avait raison depuis le début : les locatherciens ne méritaient pas de vivre.

C'était à cause d'eux si le petit enfant qu'il était avait jadis perdu son innocence. Ils n'avaient pas réussi à le protéger. Non, il n'en avaient pas eu envie.
A cause d'eux, il avait perdu sa vie. Il se résolu à le leur faire payer.

Et chaque année, à la même période, il sortit, masqué, et transmit une malédiction à ceux qui le méritaient le plus.

Jusqu'à cette année, où les derniers allaient être touchés par sa vengeance.

Si près du but...

Dommage.

Oui c'est bien dommage.

Dommage que tant d'innocents soient mort ici.

Voyez le bon coté des choses, vous aviez l'air de vous ennuyer dans votre eternité... Nous allons donc pouvoir vous soulager de ce si grand fardeau qu'a été pour vous la vie...

Bon, pour feter ça je vous propose de boire un dernier verre chez René !!!
Vous êtes invité Herudur... Je suis d'humeur à offrir une derniére belle nuit au condamné, ça se fait dans certains pays.
C'est ma tournée... les caisses de la mairie sont bien pleines...

Je sens que je vais me plaire dans ce petit village...

Johanès, j'ai le sentiment que c'est le début d'une belle amitié !!

Rumpofsteelskin retrouvait la joie de vivre, pensant à un avenir serain et aux doux et beaux écus de la mairie...

Hugo...

Tandis qu'il marchait en compagnie du maire et du forgeron, Herudur pensa à ce petit garçon qu'il avait reccueilli, aimé comme un père aime son propre fils, et mis à l'abri de cette ville maudite.

Hugo, sois fort, tu as un avenir prodigieux devant toi... j'espère que tu sauras leur pardonner... ou bien, venge-moi !

D'un bond, le confesseur se libéra de la surveillance de ses bourreaux, non sans les bousculer sévèrement.
- Désolé, "amis", mais je dois repousser l'heure de ma mort à demain !

Il fila par une ruelle, et disparut tout en remettant son masque au visage.
Il avait encore une toute dernière animation à préparer.

Et celle-là, les habitants s'en souviendront pendant longtemps.

Quelques minutes plus tard, on entendit un long, long sifflement résonner dans tout le village.

Le joueur de flûte avait été découvert, mais il n'avais pas encore dit son dernier mot.

Il ne pouvait fuir, les gardes de l'inquisition étaient postés partout. Il ne pouvait résister ni se battre bien longtemps.

Mais il pouvait ordonner à ses derniers rats d'envahir les rues, et d'agresser quiconque présenterai le bout de son pied - mis à part les chenapants, bien évidemments, ces petits bouts d'hommes tenaient plus le rôle d'alliés que d'ennemis.

L'Homme Au Masque Mauve était positionné sur le plus haut toit du village : celui de l'église, et tandis qu'il terminait d'appeler ses dernières troupes, les soldats de l'inquisition, bien que parfaitement armés, peinaient à se défendre contre ces milliers de petits rats.

Le combat durera toute la nuit, et l'issue était fatale : il finirait forcément par devoir rendre les armes... mais au moins il se sera battu contre la vermine de l'inquisiteur.
Il sourit, puis se mit à rire.

Organisateur Nombre de messages : 937 Age : 45 Date d'inscription : 30/09/2006

Enfin une nuit sans mort à Thiercelieux... pour un peu le souvenir des temps de paix anciens s'en seraient presque évanouis.

La seule chose qui s'évanouit, ce fut la nuit, pour laisser place au jour.

L'inquisiteur grimpa sur l'estrade :

Locaterciens et locaterciennes, braves visiteur de cette foire de Thiercelieux.

Grâce à la précieuse aide de votre nouveau maire, Rumpofsteelskin, le village a pu retrouver son calme et se purger de l'engence démoniaque qui avait oser y séjourner.
Le dernier rejeton de l'enfer a été identifié : il s'agissait en fait du confesseur. Je gage que cet homme n'a jamais eu la foi et aura feint d'être pieu toutes ces années.

Qu'on le brûle et qu'on en finisse !

Hamm fut amené sur le bûcher, sa flûte entre les dents pour mieux le faire taire. Le brasier fut allumé et l'homme s'enflamma... une fumée mauve s'éleva dans le ciel... puis plus rien.

Le calme était revenu à Thiercelieux. La foire pouvait s'achever dans la sérénité, pour la plus grande satisfaction des villageois.

Rumpofsteelskin sorti de chez René.

Il y avait passé la nuit à boire et était saoul comme un cochon.

Il regarda bruler le joueur de flute et leva son verre.

A la tienne, Herudur !!

Rumpofsteelskin, en tant que maire décida que c'était le bon moment pour un petit discours à ces villageois.

Il monta sur la fontaine et interpella la foule.

Il n'eut cependant pas le temps de dire un mot qu'il tomba à la renverse dans la fontaine comme l'avait fait son prédecesseur.

La foule partit dans un grand éclat de rire à la vue de cette scène familière, soulagé que la seule malediction qui avait la peau dure à Thiercelieux soit celle du "maire alcoolique et radin" !