Panique à Thiercelieux 12

Noémina se sentait étrange, mal à la tête, pourtant elle n'avait pas bu énormément la veille. Mais elle n'avait presque pas dormi !

Après avoir fait un brin de toilette, elle se regarda dans le vieux morceau de miroir qu'elle avait hérité d'une de ses tantes.

Oh ! quelle mine affreuse ! C'est vraiment moi ou c'est le miroir ?

Noémina se trouvait bien pâle, les yeux cernés. Evidemment, après les nuits de cauchemar qu'elle vivait depuis un moment, cela n'était pas surprenant.

Quand elle passa devant la bergerie, elle vit qu'un nouveau mouton avait été égorgé !
Elle fixa la bête , le rouge sang qui virait au cramoisi et qui se détachait nettement du blanc lainage de l'animal. Ah, si elle avait eu quelque talent artistique , elle aurait pu faire un tableau ou un poème sur la beauté étrange de cette scène.

Puis elle reprit le chemin de la mairie. Au loin, elle vit de la fumée.
Tiens, encore un bûcher , pensa -t-elle.
Allons aux nouvelles.

Elle tomba nez à nez avec le Père Denis, le vieux tanneur de cuir, bavard comme une commère.
Il était sur une carriole chargée de bagages .

Oh là , Père Denis ! Ou allez vous comme ça ?
M'en va Noémina !
Comment ça ?
J'en peux plus de ce village de morts !
Ah ! Encore des morts ?
Oui tiens ! Les soeurs maléfiques finissent de griller sur le bûcher. C'étaient elles, l'affreux lycan ! Elles ont attaqué notre Dame, la Duchesse !
Et dire que j' les avais vu grandir ! Bouh , si c'est pas malheureux d'voir ça !
Mais alors, le village est sauvé. Ne partez pas !
Non, j'en peux plus. Vu trop d'horreur ici. Adieu Noémina.
Tchak

La carriole reprit de la vitesse et disparut à l'horizon.
Noémina refléchissait tout en marchant. Les soeurs voulaient elle inconsciemment travailler à la mairie ? Deux adjoints, deux adjoints morts sous les crocs du lycan ! Et l'ancien maire aussi !
Heureusement qu'elles étaient mortes sinon, ....sinon c'était elle, Noémina, qui serait morte déchiquetée la nuit suivante.

La jeune femme chancela et du s'asseoir quelques minutes pour retrouver assez de force dans ses jambes pour reprendre sa route. Décidemment, ce n'était pas la grande forme !

Pauvre Duchesse ! Elle se croyait en sécurité à l'auberge !

Quand elle arriva à hauteur de la mairie, elle vit un nouveau message sur le panneau d'affichage :

Citation :: Si vous lisez ceci, c'est que vous êtes encore en vie.

Ah, je vois que certains ont conservé leur humour !

Elle alla voir René. Il avait certainement des choses à lui raconter.

- Mon... Mon coeur ! Non...

Hilare tituba, se cogna contre la table où reposait encore Guyl, et chuta contre le petit bureau.
- Ça ne peut pas... Pas comme ça ! En plein cœur... Eurk ! Eurk ! Quelle ironie !

Il chercha à se relever, sans trop de succès, et rampa avec bien du mal jusqu'à l'entrée.
Usant de ses dernières forces, il réussit à pousser la porte, et chuta à l'extérieur.

La vue était trouble, mais il réussit à voir quel quelqu'un s'approchait.
Levant difficilement le bras droit, il lui fit signe... Il attendit, nouveau signe... La personne semblait véritablement l'ignorer.
- C'est ... Ève-Angèle ! marmonna-t-til. L'ironie m'accompagnera-t-elle jusqu'au trépas ? Au moins... Sa voix était de moins en moins audible à présent. si tout s'est déroulé comme... le dernier démon ... brûler maintenant... J'aurais pour une fois... utile à la communauté... Débarrassés des démons... Le loup... le vampire... Tout finit bien...

René était tout tourneboulé par les événements de la nuit.
Le lycan avait cassé une fenêtre de l'établissement pour entrer dans la chambre de la Duchesse.
La pauvre femme avait été emportée à la morgue par des soldats de l'inquisition.

Noémina souhaita rencontrer Meuldore et quitta l'auberge, vide à présent.

Alors comme ça, son sort de malédiction n'avait pas fonctionné ?
Bon, après tout, ce n'était pas si mal puisque le lycan avait péri.

Il régnait un silence pesant. D'accord, la morgue n'était pas l'endroit le plus bruyant, mais quand même.

Elle appela : Hilare ? Hilare ? Vous êtes là ?

Pas de réponse, alors elle pénétra dans son " antre". Et là, elle vit une scène incroyable : le corps de la Duchesse reposait d'une façon bizarre sur la table d'autopsie . Quant à Hilare Meuldore, il allait rejoindre sa clientèle habituelle. Il était mort ou presque mort ! Un scalpel était planté dans son coeur.
Noémina resta plantée là un moment, cherchant à comprendre le déroulement des événements.
Meuldore gémissait. Noémina s'approcha lentement, l'oreille dressée. Le criminel était peut-être encore dans les parages.

Citation :: C'est ... Ève-Angèle !

Noémina tourna la tête vers l'homme qui venait de rendre l'âme.
Eve-Angèle ? C'est elle qui a fait ça ?

Alors Noémina sut ce qu'elle allait faire. Le front brûlant de fièvre, elle ressortit à la recherche de l'aveugle. Elle avait une furieuse envie de tuer...de..... de mordre....jusqu'au sang ! Bientôt l'aveugle ne serait plus !

Le lendemain , les derniers villageois vivants ne parlaient que de ça :
on avait retrouvé le corps d'une jeune aveugle derrière la mairie.
Son corps semblait comme vidé de son sang !
La mairesse ,Noémina, était morte elle aussi.
Elle s'était suicidée en se plantant un coupe papier dans la carotide.

Les soldats de l'Inquisition trouvèrent un mot sur le bureau :

Citation :: Je vais libérer la ville de ses derniers monstres. Dormez tranquilles braves gens, vous êtes sauvés.

Vostre dévouée, Noémina.